"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 12 février 2014

La staritza Evdokia (Eudocie), folle-en-Christ (II)



(+ 24 octobre/6 novembre 1890)

Quand elle vivait au monastère, elle fabriquait des chaussures pour les moniales, et pour cela elle était tout le temps exposée au goudron. Quelquefois, elle tricotait de petites coiffes avec de l’herbe des marais. Lorsqu’elle remarquait qu’une des moniales commençait à l’estimer, elle devenait très dure avec elle.
L’été elle s’habillait en vêtements chauds; en hiver, elles marchait pieds nus, et ne se couvrait pas les oreilles, même par le temps froid le plus intense. Elle marchait ainsi dans Toula. Elle n’acceptait aucun don de quelque sort que ce soit pour elle, et  elle disait à une jeune fille proche d’elle, qu’elle ne permettait à personne de lui apporter un don, car si on laissait une personne le faire, il n’était plus possible de s’en débarrasser. Mais quand on apportait quelque chose à manger à son chat, alors elle l’acceptait.
Elle supplia une moniale de la laisser vivre dans un grenier froid, et là, elle vécut, pendant dix-sept années durant les hivers, dans un froid terrible.
Plus d’une fois, elle voyagea jusques à Kiev, été comme hiver. Habillée comme d’habitude, elle supportait tous les désagréments du voyage, et elle aimait ces voyages, car ils lui donnait une occasion d’être dans une parfaite solitude orante. Et le Seigneur Lui-même, gardait visiblement Sa fidèle servante. La plupart du temps durant son voyage, elle aimait passer la nuit, non pas dans les villages, mais sous les arbres, dans de petites forêts.
Un jour, alors qu’elle se reposait dans une forêt, deux loups s’approchèrent d’elle, se tinrent longtemps près d’elle, puis, sans lui faire le moindre mal, ils s’en allèrent. Quand la jeune fille à qui elle racontait cela demanda à la bienheureuse* si elle ne fut pas effrayée, Evdokia répondit pas du tout, car elle ne les gênait pas. A une autre occasion, quand la glace sur la rivière se brisait, elle traversa sans dommage sur un bloc de glace alors qu’il semblait qu’il n’y avait aucune chance qu’elle en réchappe.
Après dix-sept ans de vie dans le grenier, la bienheureuse, ayant enduré beaucoup de maux des esprits malins et de gens méchants, fut forcée de quitter ce grenier. Elle s’installa alors dans une cave sous une autre  cellule où elle vécut cinq ans. Une jeune fille proche d’elle raconta ainsi sa vie dans la cave : "J’étais chez elle l’hiver dans son abri incroyable où il il y avait de très petites fenêtres, mais aucun poële… On se tient dans sa pièce en silence… On regarde seulement comment elle vit… Sur ses murs il y a une telle abondance de neige que tout est couvert de blanc. Et elle allait chez elle comme dans une cellule ornée de marbre, avec un vieil habit monastique, avec seulement des bas et un petit bonnet d’été sur la tête."
Quand la propriétaire eut besoin de cette cave, elle vécut dans une petite baraque pendant toute une année. Avec la permission de l’higoumène, un bienfaiteur fit une cellule en pierre de 3 mètres soixante de long pour la bienheureuse, mais même là, elle se faisait une vie très rigoureuse. Elle n’allumait pas le poële: il faisait froid dans la cellule, et elle laissait la porte presque à moitié ouverte. Dans cette pièce, la bienheureuse apporta vingt grosses poules avec lesquelles elle vécut constamment ; et il y avait aussi des pigeons. Il y avait de petites rigoles pour les oiseaux et du fourrage. Par cette pauvreté, dans la cellule froide, pleine de poules, d’une saleté inimaginable, la bienheureuse s’isolait des gens, et s’adonnait pleinement au combat de la prière.



Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Ascetic Strugglers of Piety
Volume II
(original Russian Strugglers for Piety 
of the 18th and 19th centuries
October Volume, Moscou 1909 [en russe])
Saint Païsius Orthodox Women Monastery
Safford, Arizona
USA


Note: 
* Le terme de bienheureux (bienheureuse) appliqué à un saint, signifie qu'il était fol-en-Christ, il n'est en rien l'expression d'un grade dans la hiérarchie de la sainteté, comme dans la conception hétérodoxe occidentale.


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