"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 15 mai 2013

Des péages aériens (3)

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Saint Dorothée de Gaza ajoute encore la pensée véritablement terrifiante que «les âmes des morts se souviennent de tout ce qui s'est passé ici... [elle] se souvient des passions qu’elle a eues et des péchés qu'elle a commis et des personnes avec lesquelles elle les a commis" et "elle est seule avec ses propres passions et, en bref, elle est tourmentée par elles». [7] saint Ephrem de Syrie enseigne de même que lors de la mort, l'âme voit "toutes les oeuvres qu'elle a réalisées, bonnes et mauvaises, de jour et de nuit ". [8] C'est pourquoi les Pères nous encouragent à nous rappeler le jour de notre mort imminente, car ceux qui s’adonnent en vérité au souvenir de la mort ne pécheront jamais. [9]

Il convient de noter que pour le juste, la séparation de l'âme et du corps n'est pas effrayante, mais c'est en fait joyeux, car il a déjà commencé à goûter à la vie spirituelle et l'âme va demeurer dans la béatitude de la lumière du Christ. Encore une fois, saint Ephrem enseigne que «le juste et le saint, et les ascètes se réjouissent à l'heure de la mort et de la séparation... Leurs âmes bondissent car ils sont prêts à sortir de leur corps pour leur repos», et saint Séraphim de Sarov s'exclame: «Quelle joie, quelle exultation attendent l'âme quand les anges de Dieu viennent la prendre.» [10] Le psalmiste déclare: «Précieuse, aux yeux du Seigneur est la mort de Ses saints» (Psaume 115:6). Mais pour ceux qui ne se sont pas eux-mêmes totalement unis au Christ dans cette vie, la séparation de l'âme et du corps est redoutable, car elle n'est pas naturelle, et en outre, parce qu’à la mort, par la suite l'âme est entourée et attaquée par des démons horribles. "Le mal tue le méchant », dit le roi David (Psaume 33:22). Cette réalité est rappelée à plusieurs reprises dans notre riche tradition liturgique. Tous les soirs aux Petites Complies l'Eglise prie: «Et au moment de mon départ de cette vie, prends soin de mon âme misérable et éloigne d'elle les formes ténébreuses des mauvais démons», [11] et à l'Office de la séparation de l'âme et du corps, nous prions: «Ô refuge réputé des pécheurs et de ceux qui sont contrits, fais-moi connaître ta miséricorde, ô Toute Pure, et délivre-moi des mains de démons: carr beaucoup de chiens m'ont entouré »[12 ] Ce ne sont que deux des innombrables exemples qui pourraient être mis en avant. [13]

Par ces attaques de démons, est accompli le jugement particulier dont saint Paul a écrit: "Et comme il est réservé aux hommes de mourir une fois, après quoi vient le jugement» (Hébreux 09:27). Saint Ignace Briantchaninov écrit que depuis l'époque de la chute d'Adam jusques à la destruction de l’Hadès par le Christ, Satan se tenait sur le chemin vers le Paradis bloquant l'entrée de chaque âme, et après la résurrection du Christ, il continue à prendre ces âmes qui s'inclinent vers lui. Il poursuit:

Tous ceux qui ont ouvertement rejeté le Rédempteur constituent l'héritage de Satan: leurs âmes, après la séparation du corps, descendent tout droit en enfer. Mais les chrétiens qui sont enclins au péché sont aussi indignes d'être immédiatement traduits de la vie terrestre à l'éternité bienheureuse. La justice elle-même exige que ces inclinations au péché, ces trahisons du Rédempteur doivent être pesées et évaluées. Un jugement et une évaluation sont nécessaires afin de définir le degré d'inclinaison d'une âme chrétienne au péché, afin de définir ce qui prédomine en elle - la vie éternelle ou la mort éternelle. Le Jugement de Dieu sans hypocrisie attend chaque âme chrétienne après son départ du corps. [14]

Version française Claude Lopez-Ginisty
D’après

Notes :

[6] The Lenten Triodion, Seminary Press Saint-Tikhon (1994), p. 144.

[7] Discourses and Sayings, Cisterna Publications (1977), pp 185 184.

[8] The Ascetic Works, dans la version en grec moderne par Mark D. Sakkorrafos, Athènes 1964, p. 155, QTD. dans Cavarnos, Future Life, p. 22.

[9 St. John Climacus, The Ladder of Divine Ascent, 6:24.

[10] St. Ephraim, The Ascetic Works, p. 9, and Cavarnos and Zeldin, St. Seraphim of Sarov, in Modern Orthodox Saints V (1980), p. 47; tous deux cités in Cavarnos, The Future Life, pp. 22, 23.

[11] Prière à la Mère de Dieu par le moine Paul

[12] Office at the Parting of the Soul from the Body, Canon of Prayer to the All-undefiled Birth-giver of God, on behalf of a man whose soul is departing, and who cannot speak, in Hapgood, Service Book of the Holy Orthodox-Catholic Apostolic Church (1965), p. 361.

[13] The Office at the Parting of the Soul from the Body alone contains eight references to the assault of demons upon the newly-departed soul. Additionally, from the Menaion for Sept 3rd, the Theotokion on the Praises: “Carelessly reclining in the bed of languor and heedlessness, I most slothfully pass through life; and I fear the hour of death, lest that wicked serpent, like a savage lion, in snatching up my lowly soul, rend it asunder with ruthless villainy; O blameless Theotokos, in thy goodness, hasten before the end to bestir me and raise me up to repentance and change of life,” Holy Transfiguration Monastery, p. 60.

[14] Bishop Ignatius, Collected Works, vol. III, p. 136, cité  in Fr. Seraphim Rose, Soul After Death, p. 65. Je souligne - pour mettre en évidence que les questions des péages aériens ne sont pas une affaire juridique d'inspiration latine, mais sont plutôt un moyen permettant de déterminer l'amour pour Dieu, ou son absence, dans l'âme de l'homme. Mgr Ignatius, Œuvres, vol. III, p. 136, QTD. en Fr. Seraphim Rose, âme après la mort, p. 65.

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